DNC. Le vétérinaire Jérôme Pinet appelle à un changement radical de stratégie

Rédigé le 23/12/2025
Klervie Vappreau

Découvrez l’analyse du vétérinaire Jérôme Pinet sur la crise de la dermatose nodulaire contagieuse dans les Pyrénées et l’Ariège. Face à la propagation du virus malgré la vaccination, il appelle à l’arrêt de l’abattage systématique des troupeaux, à une vaccination massive et à un abattage ciblé pour éradiquer la maladie efficacement.


Alors que la RN20 a été rouverte à Tarascon-sur-Ariège après plus de dix jours de blocage agricole, la crise sanitaire qui frappe les élevages bovins dans les Pyrénées reste extrêmement préoccupante. Le virus de la dermatose nodulaire continue de circuler, avec un 22ᵉ cas confirmé à Saint-Marsal malgré une vaccination complète des troupeaux, et un nouveau foyer détecté à Juzet-d’Izaut en Haute-Garonne.

Dans ce contexte, Jérôme Pinet, vétérinaire à Mirepoix depuis 2006 et vétérinaire rural depuis plus de 25 ans, tire la sonnette d’alarme. Dans une lettre ouverte adressée au Premier ministre et à la ministre de l’Agriculture, il insiste sur l’urgence d’une décision politique pour adapter les protocoles face à cette épidémie. Pour lui, l’abattage systématique des troupeaux n’a plus lieu d’être, car il devient contre-productif et menace l’éradication effective de la maladie.

La nécessité de documentation justifiant le protocole

Le vétérinaire s’appuie sur deux sources scientifiques majeures. L’avis de l’EFSA du 9 août 2016 indique que « si la vaccination est méticuleusement appliquée, l’abattage partiel des animaux atteints se révèle aussi efficace que l’abattage de troupeaux entiers ». Aucun avis ultérieur ne contredit cette conclusion. Plus récemment, le 14 novembre 2025, la Fédération des Vétérinaires d’Europe a appelé à « privilégier la prévention plutôt que l’abattage massif des animaux », position relayée par l’Académie Vétérinaire de France début décembre.

L’abattage total devient un frein à la détection des foyers

Jérôme Pinet souligne également un enjeu humain et moral : la peur de voir leur troupeau abattu pousse certains éleveurs à ne pas déclarer de cas, ce qui favorise la circulation du virus. « Dans le contexte actuel, l’abattage total devient un obstacle à l’éradication de la maladie », écrit-il, estimant qu’un protocole d’abattage ciblé et de surveillance rapprochée encouragerait les éleveurs à signaler rapidement les cas et permettrait un contrôle sanitaire plus efficace.

Le vétérinaire appelle donc à plusieurs mesures concrètes : L’arrêt immédiat de l’abattage total des troupeaux, la poursuite d’une vaccination rapide, massive et élargie à tout le territoire concerné, le blocage strict des mouvements de bovins, et la mise en place d’un protocole d’abattage ciblé avec une surveillance très rigoureuse des élevages touchés.

« Un protocole qui n’a pas l’adhésion de tous les acteurs est voué à l’échec »

    Ces mesures combinées permettraient d’éradiquer la maladie tout en préservant l’adhésion des éleveurs et des vétérinaires de terrain, essentielle au succès de tout protocole sanitaire. Il plaide également pour que les décisions soient prises localement, dans les Pyrénées, afin de mieux adapter les stratégies au terrain et d’apaiser les tensions entre acteurs.