Ariège : malgré l’ouverture de la vaccination contre la DNC, l’inquiétude persiste chez les éleveurs
Rédigé le 19/12/2025
Stephanie Leborne
À Saint-Victor-Rouzaud, près de 200 bovins ont été vaccinés vendredi sur l’exploitation Roubichou.
Dix jours après l’annonce d’un premier cas de dermatose nodulaire contagieuse (DNC) en Ariège, le monde agricole tente de reprendre son souffle. La crise reste vive dans les esprits. Aux Bordes-sur-Arize, plus de 200 bovins ont été abattus, laissant derrière eux des exploitations meurtries et un profond sentiment d’injustice.
En réponse, l’État a déclenché une mesure dite « d’urgence » avec une campagne de vaccination « accélérée » dans le Sud-Ouest, et particulièrement en Ariège. Dans un communiqué daté du 16 décembre, le gouvernement affiche ses objectifs : « Les 1 000 exploitations de l’Ariège seront intégralement vaccinées d’ici au 31 décembre 2025. »
Le GAEC Roubichou a vacciné son cheptel ce vendredi matin. Photo SL
Pour tenir ce calendrier, 400 000 doses de vaccins ont été acheminées, avec le renfort de 17 membres du Service de santé des armées (SSA). Sur le papier, la machine est lancée. Sur le terrain, l’inquiétude demeure.
Une matinée de vaccination à Saint-Victor-Rouzaud
À Saint-Victor-Rouzaud, ce vendredi 19 décembre au matin, la vaccination est entrée dans le concret. Sur l’exploitation de Romain Roubichou, l’ensemble du cheptel a reçu son injection.
Le GAEC Roubichou a vacciné son cheptel ce vendredi matin. Photo SL
Dès l’aube, la ferme s’est transformée en véritable fourmilière. Parents, voisins, amis et une vétérinaire venue de Pamiers se sont relayés pour que tout se déroule dans les règles. « On a commencé à tout préparer vers 5h30 du matin pour débuter la vaccination à 8h30. Entre les mères et les veaux, on est quasiment à 200 bêtes », explique Romain Roubichou.
Contention des animaux, respect strict des protocoles sanitaires, rythme soutenu mais maîtrisé : ici, rien n’est laissé au hasard. Dans la commune, quelques exploitations ont été vaccinées avant eux. « On est dans les premiers », souligne le jeune éleveur.
Une étape importante, mais loin de suffire à apaiser toutes les craintes.
« Soulagés oui et non »
Si la vaccination apporte un début d’espoir, l’angoisse reste bien présente. « Soulagés oui et non, confie Romain Roubichou. On sera vraiment soulagés le jour où ils arrêteront l’abattage total. On ne sait pas trop où on va encore, est-ce que ça sera concluant ou pas ? On ne sait pas. »
Un sentiment partagé par sa mère, elle aussi présente toute la matinée.
« En colère de ne pas être écoutés »
« On est forcément soulagés d’arriver enfin à pouvoir vacciner, et agacés parce que c’est regrettable d’avoir mis tout ce temps-là pour que tout le monde puisse vacciner rapidement », explique-t-elle, avant de poursuivre :
« Nous, on est la génération qui avons fait tout ce qu’il faut pour que nos jeunes puissent récupérer nos exploitations. Et savoir qu’on fait un abattage total quand il y a un cas, alors qu’il pourrait y avoir d’autres moyens, oui, on est forcément en colère de ne pas être écoutés, de ne pas être entendue. Et de voir des gens qui, tout là-haut, décident sans prendre conscience du mal qu’ils sont en train de faire. »
Le GAEC Roubichou a vacciné son cheptel ce vendredi matin. Photo SL
Deux mois d’incertitude
Sur le GAEC Roubichou, le compte à rebours est désormais lancé. Il faudra attendre 21 jours pour que l’immunité induite par le vaccin soit pleinement effective, avec l’espoir qu’aucune contamination ne survienne d’ici là.
Une période de vigilance quotidienne. « On vérifiera tous les jours, on désinfecte, on fait ce qu’il faut au maximum », reprend l’éleveuse.
Mais l’attente ne s’arrête pas là. La dermatose nodulaire contagieuse présente un délai d’incubation long, de 28 à 35 jours. Même vaccinés, les éleveurs devront donc patienter près de deux mois avant de pouvoir se dire réellement rassurés.
Deux mois à vivre avec l’angoisse en toile de fond, dans l’espoir que la maladie ne franchisse pas les barrières mises en place et que le travail de toute une vie ne bascule pas une nouvelle fois.
Ce vendredi 19 décembre, 25 539 bovins ont déjà été vaccinés en Ariège, indique la préfecture.